interview De Rui Frati, Directeur ARTISTIQUE du Theatre de l'opprime de paris

Directeur du Théâtre de l'Opprimé de Paris depuis 12 ans, Rui Frati a fait d'un côté des études de sociologie et de communication et en parallèle des études de théâtre au Brésil. Ce dernier est d’ailleurs son pays natal, il détient une double nationalité brésilienne et italienne. Depuis tout petit sa vocation est le théâtre et c'est donc un rêve qu'il a fini par réaliser après avoir passé 3 mois à Londres.

Rui Frati a toujours travaillé dans le milieu du théâtre et sa seule expérience professionelle hors de ce contexte est d'avoir travaillé 4 mois dans un petit restaurant italien.

Cet homme a connu Augusto Boal en 1970 et cette rencontre a fortifié sa passion pour le théâtre, il a assisté à plusieurs spectacles d'Augusto Boal. Boal a été professeur d'université à Lisbonne ; c'est en réalité le père de Rui Frati qui a créé une amitié avec lui en Argentine, puis cette amitié s'est transmise lors de leur arrivée en Europe. Rui Frati à l'âge de 20 ans était sûr de son choix professionnel qui n'était pas approuvé par sa famille au début, il a été le collègue de Boal au Conservatoire de Lisbonne. A ce moment-là, le Théâtre de l'Opprimé était en conception. Au début, il s'appelait Ceditad.

A son arrivée en France, il travaille dans un collège en tant que professeur de théâtre. Ensuite, il a été appelé par le Théâtre de l'Opprimé qu'Augusto Boal avait créé quelques années plus tôt, Boal vivait alors au Brésil et revenait très rarement en France. Au début il ne voulait pas reprendre ce théâtre sans grand intérêt à ses yeux car il aurait dû reprendre une compagnie vieillissante, puis il a relativisé la chose car étant donné que Boal était contraint de retourner dans son pays, sans Rui Frati le théâtre ne vivrait plus. Rui Frati à partir de ce jour a pris les choses en main : il a trouvé un local qui se trouve dans le 12eme arrondissement de Paris, un ancien dépôt de meubles qui a été subventionné par la DRAC pour les aider à rénover le lieu, et l'a repris en tant que lieu pour les théâtres forum. C'est donc en 1999 qu'il prend la direction du Théâtre de l'Opprimé de Paris, du groupe. Son premier but étant de redynamiser l'image de cette troupe, il prend l'initiative d'envoyer des lettres aux jeunes qui avaient participé à des stages organisés par le Théâtre de l’Opprimé un peu avant. Il y a eu reconstitution de la Compagnie avec ces jeunes entre autres qui a redynamisé cet ancien dépôt de meubles. Des jeunes ont commencé à travailler avec eux ; M. Frati était désigné comme chef de projet et le travail et les responsabilités étaient partagées. Il fallait repenser des choses et lui même nous a dit qu'à l'heure d'aujourd’hui il était toujours à la recherche de nouveaux progrès pour donner de l'espoir aux gens. Pour eux leur pacte d'action était de mélanger théâtre et éducation ensemble.

Parallèlement à ce théâtre Rui Frati travaillait en Italie depuis 9 ans dans un petit théâtre et nous a raconté le jour le plus affreux de sa vie : il était devant 850 jeunes en classe de 3ème et il a essayé de faire participer et réfléchir les jeunes de la salle. Ceux ci-qui avaient reçu beaucoup de consignes d’intervenants et de professeurs. Il était angoissé car les jeunes avaient faim et en avaient assez, il pensait être très mal reçu par eux à cause de ces raisons. Il a pensé qu’il fallait quand même qu’il le fasse. Il leur a dit que s’ils ne participaient pas et ne faisaient rien, il n’allait rien se passer, car jusqu’à maintenant ils avaient entendu les gens leur parler pendant longtemps, mais que maintenant c’était à leur tour. Les comédiens avaient seulement une petite pièce qui servirait de départ et qui devait provoquer des réactions. En fin de compte, ils ont tous beaucoup réagi."C'est dans la relation avec les jeunes qu'on change les choses."

Différentes thématiques sont proposées, telles que les addictions, les comportements d'exclusion, les conflits au travail ou les discriminations au travail, le harcèlement, le handicap mais aussi le développement durable ou bien des sujets comme l'homophobie, une grossesse indésirée, la parentalité ou encore les violences à l'école, la prévention du suicide, la prévention du sida, le tabagisme, le racisme, les violences faites aux femmes etc...

Aujourd'hui, cet homme d'une soixantaine d'années a proposé son projet à l'Union Européenne, qui serait de faire une interaction à distance en communiquant grâce aux nouvelles technologies pour donner du courage et de la force d'avancer par rapport aux différents problèmes de société et  aux préjugés qui sont présents partout. Cela revêt plus une dimension politique dans le sens noble qu'humanitaire. Son projet serait de faire cette interaction entre cinq pays dans lesquels les jeunes sont enfermés dans leur monde sans issue apparente pour travailler à distance et ainsi casser le mur que représente la présence physique. Les 5 pays qui ont de forts préjugés comme la Roumanie (préjugés par rapport aux Roms qui seraient des voleurs...), l'Italie (Gennes, difficulté de trouver du travail), Palestine (mur israélo-palestinien), la France et le Portugal: et c'est là que se pose la question de comment utiliser les nouvelles technologies dans le théâtre forum avec les jeunes tout en essayant de faire évoluer les mentalités à travers les débats de société et bien sûr le dialogue.